MICROGRAVITE

Mise à jour décembre 2000, revu sept 2011

I Préliminaires

II Etat d'apesanteur

III Microgravité

IV Utilisation industrielles : microgravité et vide spatial

V Les moyens de la microgravité

Tours

Ballons

Stations

Avions et vols paraboliques

La microgravité a un domaine d'application immense tant sur le plan pratique que théorique. Avant de développer ce sujet, nous préparons le lecteur a bien comprendre l'origine de la microgravité.

I PRELIMINAIRES :

Contrairement à ce que l'on peut penser, la notion d'apesanteur ou encore d'impesanteur, ne tombe pas sous le sens commun et demande une mise au point.

1°) NOTION DE FORCE SPECIFIQUE :

Imaginons une "boite", en pratique une capsule spatiale, notée S de masse M et de centre d'inertie G. Notons :

 

 La résultante de toutes les forces extérieures(1) autres que gravitationnelles agissant sur la capsule

 La résultante de toutes les forces de gravitation(2) agissant sur la cabine

 L'ACCELERATION dite STATIQUE(3) ou encore FORCE SPECIFIQUE

 L'accélération due à la gravitation

 La poussée moteur, supposée sur l'axe lanceur D.

 La force de traînée

 (1) Il s'agit principalement:

Il s'agit secondairement des forces de perturbation autres que gravitationnelles:

 (2) Il s'agit exclusivement des forces de gravitation:

 (3) Cette notion d'accélération statique apparaît dans toutes les données graphiques concernant un lanceur. En effet, généralement, durant une phase propulsée, le vol se déroule quasiment à incidence nulle, la poussée et la traînée sont alors portées par l'axe longitudinal du lanceur, alors que la pesanteur a une orientation qui dépend de l'assiette. De plus l'accélération due aux forces non gravitationnelles est la seule ressentie par un être humain qui serait présent à bord, puisque sous la seule gravitation un passager flotte dans la cabine, ce que nous montrons par ailleurs.

On parlera donc de l'accélération statique, sans plus jamais préciser sa direction, bien connue de tout le monde.

EXEMPLE: LES GRAPHES DE PERFORMANCES FOURNIS POUR LES LANCEURS, dans le MUA :

Ci-dessous ceux relatifs à l'excellent lanceur de la famille ARIANE 4, qui rassemble l'ensemble des paramètres utiles , dont notamment l'ACCELERATION STATIQUE bien précisée sur le graphe.

Commentons la courbe G :

T

G statique

0

16 m/s² ==> accélération réelle (G-g) de l'ordre de 6 m/s²

30 s

Saut d'accélération qui correspond au largage des PAP

60 à 80 s

Le palier marque le passage du mur du son

130 s

Saut d'accélération après largage des PAL

Vers 210 s

Extinction de l'étage 1 et largage de l'étage vide

Etc...

 

2°) PRINCIPE DE RELATIVITE D'EINSTEIN-GALILEE :

 Einstein s'est posé une question simple et capitale, pour qui envisage de quitter notre planète pour un voyage dans le système solaire ou plus loin.

Un astronaute voyageant dans une capsule spatiale totalement isolée du reste du monde ( du moins en ce qui concerne l'information et les ondes de toute sorte), est autorisé à emporter tout ce qu'il lui plaît ( livres, musique, énergie sous toute ses formes, encyclopédies, appareillages de mesure de toute sorte mais non liés à l'extérieur,....).

QUESTION ? Que peut-il connaître ou mesurer de son mouvement?

La réponse apparaît comme indémontrable et annoncée comme un principe, dit PRINCIPE DE RELATIVITE D'EINSTEIN-GALILEE:

A bord du véhicule on ne pourra connaître du mouvement de la capsule que :

 La FORCE SPECIFIQUE ou encore l'ACCELERATION STATIQUE

Comment? Par un boîtier accélérométrique, comportant 3 accéléromètres mesurant la composante de l'accélération statique sur 3 directions orthogonales.

 Le vecteur rotation instantanée, donc mesuré dans une base galiléenne

Comment? Par un boîtier gyrométrique, comportant 3 gyromètres mesurant la composante du vecteur rotation absolue sur 3 directions orthogonales.

INTERÊT DU PRINCIPE ?

La force spécifique élaborée par une centrale inertielle, permet de calculer l'accélération absolue, la vitesse absolue et la position dans un repère galiléen, donc ensuite dans tout repère intéressant pour la capsule. On a donc inventé un système de localisation ou NAVIGATEUR INERTIEL.

Le vecteur rotation absolu permet de calculer les angles d'orientation et donc l'attitude de la capsule. On a donc inventé un système d'orientation dans l'espace.

Ces deux conclusions sont capitales pour un voyage lointain, car la capsule "sait" parfaitement où elle se trouve et comment elle est orientée. C'est la base de LA NAVIGATION INERTIELLE, dont nous expliquerons plus loin le fonctionnement.

II ETAT D'APESANTEUR :

Personne ne peut imaginer ce qu'est cet état, dont nous avons vu les effets lors de retransmissions télévisées. Essayons de le caractériser.

1°) DEFINITION :

On dit qu'un corps est en état d'apesanteur( ou impesanteur ), lorsqu'il n'est soumis qu'aux seules forces de gravitation. Autrement dit:

Ce n'est donc surtout pas l'absence de gravitation. C'est tout le contraire, seule la gravitation est présente.

2°) CONSEQUENCES :

Imaginons une cabine spatiale So de centre d'inertie Go, de masse Mo et un astronaute S de centre d'inertie G, de masse m. Supposons qu'à l'instant du calcul, l'astronaute ne soit pas en interaction avec la cabine, avec les centres d'inertie confondus et sans vitesse relative par rapport à la cabine. Autant dire , à l'instant du calcul G et Go ont même position et même vitesse absolue dans un repère galiléen ou inertiel.

NB : Les deux corps ayant des dimensions relativement réduites, quelques dizaines de mètres au plus pour la cabine en particulier, nous confondrons centre d'inertie et centre de gravité.

Equations du mouvement :

La loi fondamentale de la dynamique appliquée séparément aux deux corps qui ne sont en interaction, donne :

Conclusions :

De toute évidence G et Go restent toujours confondus, ce qui se traduit par G et Go ont la même trajectoire. De manière plus imagée, même si les mouvements de rotation de S et So ne sont pas identiques, l'ASTRONAUTE DONNE L'IMPRESSION DE FLOTTER PAR RAPPORT A LA CABINE.

C'est le phénomène d'APESANTEUR. On peut encore dire d'une manière différente que les 2 corps en CHUTE LIBRE, "tombent" de la même façon.

Ce sont des conditions qui se rencontrent presque parfaitement en orbite au dessus de 250 km d'altitude ou dans un voyage Terre-Lune.

Pour se convaincre de l'effet de flottement, il faut se reporter aux documents vidéo qui provenait de la station MIR en particulier ou de la NAVETTE US.

III MICROGRAVITE :

1°) MISE EN EVIDENCE :

On parle de microgravité dans les vaisseaux spatiaux, du fait des accélérations résiduelles provenant de l'attraction réciproque des corps( alors que avions posé qu'il n'existait pas d'interactions entre les 2 corps), du mouvement des astronautes, des vibrations, de la dilatation ou contraction des structures de la cabine, d'un freinage du à une atmosphère résiduelle........

Le fait même que G et Go, par exemple ne soient pas confondus entraîne un gradient de gravité.

Pour conclure on réserve le nom de microgravité à un environnement spatial dans lequel l'accélération résiduelle relative est de l'ordre de 10-4g à 10-8g.

NB : La microgravité est d'autant plus difficile à obtenir, qu'il existe des mouvements perturbateurs dans le véhicule ( vols humains, pompes ou ventilations, etv...)

2°) EFFETS PHYSIQUES IMMEDIATS :

PHENOMENES ABSENTS

 Absence de pression hydrostatique dans les fluides

 Disparition de la convection ==> dificulté de refroidissement de certaines électroniques, températures de cabine peu homogènes ( nécessité de ventilateurs ) ...

 Sédimentation absente

 Poussée d'Archimède absente

 Absence de stratification dans les mélanges de densité différentes(sur Terre)

 Lévitation ( pas de contamination par le contenant )

PHENOMENES IMPORTANTS

Certaines forces occultées sur terre, prennent une importance nouvelle:

 Capillarité

 Mouillabilité

Phénomènes de tension superficielle

 Sur un plan médical, on constate une répartition différente du sang dans le corps humain, en particulier une accumulation du sang dans les parties hautes du corps.

 Egalement, par manque de pression dans les articulations, une baisse du taux de calcium dans les os, une dilatation de la colonne vertébrale....

3°) HISTOIRE DE LA MICROGRAVITE :

Depuis longtemps ce domaine a intéressé les chercheurs. La réalisation de conditions de microgravité, va de la tour ou tube à chute libre jusqu'aux stations spatiales les plus modernes, en passant par l'avion.

Quatre critères sont importants :

 Un premier critère est le niveau de microgravité souhaité, 10-2g dans un avion et classiquement 10-7g dans une station orbitale.

 Le deuxième est très pénalisant, c'est la durée de microgravité, durée qui dépend essentiellement du moyen d'emport utilisé. Voir plus loin.

 En matière de production industrielles se pose la question du coût.

 La masse du matériel industriel ou expérimental à emporter

IV UTILISATION MICROGRAVITE ET VIDE SPATIAL :

Les conditions particulières de la microgravité, permettent la mise en œuvre de processus impossibles ou difficiles sur terre. Il est naturellement impossible de dresser une liste exhaustive de toutes les applications et encore moins d'entrer dans les détails de la technologie. Seuls quelques exemples sont indiqués

1°) Purification :

La biologie moléculaire et les bio-industries travaillent sur des macromolécules d'origine biologique(protéines, peptides, ARN, ADN,...) pour lesquelles la purification est capitale.

On procède à une séparation par champ électrique, l'ELECTROPHORESE qui permet aussi de séparer des cellules. La microgravité qui élimine la sédimentation et réduits les effets convectifs améliore la résolution

Citons aussi :Séparation par gradient de vitesse, de pH

2°) Microencapsulation :

La médecine s'oriente vers des traitements qui aident et complètent l'action de l'organisme humain. Il faut aussi apporter des substances palliatives ou substitutives. La délivrance de ces produits doit permettre une distribution in situ, au bon moment, lorsque l'organisme en a besoin. Ceci ne peut être atteint par la chimie habituelle. On est ainsi arrivé au concept de MICROENCAPSULATION de cellules ou d'amas cellulaires dans des microsphères, qui vont produire les substances nécessaires sur demande de l'organisme.

3°) Processus de fusion et solidification :

La solidification dirigée de métaux, d'alliages ou de semi-conducteurs, permet d'en contrôler les propriétés. Elle consiste à refroidir le liquide en lui imposant un flux thermique directionnel. La microgravité qui élimine la convection permet un résultat homogène à structure régulière.

4°) Elaboration de semi-conducteurs :

C'est la maîtrise de croissance de monocristaux à partir de bains fondus qui est essentielle. Les lingots obtenus sont découpés en tranches sur lesquelles des couches actives sont déposées, permettant la réalisation de circuits logiques.

Là encore l'absence de gravité et de convection, éliminant les turbulences et les contaminations, permettent une grande qualité de résultat.

5°) Production de verres et céramiques :

Sur terre la gravité et la convection créent des gradients de températures dans les pâtes en refroidissement. Il en résulte des inhomogénéités des verres qui nuisent à leur qualité. Dans l'espace ces difficultés disparaissent, de même que sont modifiées la diffusion, les tensions superficielles, la viscosité, permettant l'obtention d'émulsions homogènes et un contrôle du dopage dans des interfaces.

6°) Films minces :

En électronique et en métallurgie on utilise les films minces pour la conception de détecteurs de rayons X, de cellules solaires, de semi-conducteurs, de films photographiques ou encore en optoélectronique.

Le dépôt est fait par croissance en phase vapeur. Le danger est la contamination par l'environnement. dans l'espace les résultats obtenus sont beaucoup plus purs.

7°) Autres applications :

Fabrication de sphères sans contenant, en utilisant la lévitation

Croissance unidirectionnelle de cristaux

Gravure par faisceau

Dépôt et métallisation sous vide ( vide spatial existant)

Réalisations de mélanges homogènes (absence d'émulsions stratifiées)

Etude de croissance cellulaire, cultures cellulaires ( environnement stérile)

Etude de processus nécessitant des rayonnements ( celui du soleil est constant et illimité)

Mise en œuvre de processus dans un environnement vibratoire très faible

IV LES MOYENS D'EMPORT :

1°) Tours et tubes à chute libre :

C'est le premier système utilisé en France (ZARM et CENG), aux USA ( Lewis et Marshall) avec des temps de microgravité courts de 3 s à 10 s et un niveau de microgravité de l'ordre de 10-4g à 10-8g

2°) Largage depuis un ballon :

Temps de microgravité de l'ordre de 60 s et un niveau de microgravité de l'ordre de 10-2g à 10-4g, avec un emport possible de 200 kg ( Mikroba)

3°) Vols paraboliques en avion :

Temps de microgravité de 15 à 60 s un niveau de microgravité de l'ordre de 10-2g à 10-3g, avec un emport possible de 200 à 600 kg.

Vols réalisés en Caravelle ou Dornier F28 en France et KC 135, LEARJET, F104, T33 aux USA et Canada, Iliouchine EN URSS

Cette technique demande une petite explication mécanique :

Considérons un avion en vol, soumis aux forces classiques que sont:

La pesanteur P, la résultante aérodynamique R qui se décompose en traînée Rx opposée au vecteur vitesse et portance P normale au vecteur vitesse, dans une direction qui dépend de l'incidence, cette force dépend essentiellement du pilotage de l'avion et en particulier de l'incidence, et enfin la poussée des moteurs F également réglée par le pilote.

L'équation du mouvement du centre d'inertie G s'écrit :

Tout l'art du vol parabolique réside dans un pilotage très fin, où le pilote place l'avion dans une configuration où 3 forces s'annulent pour ne laisser la place qu'à la pesanteur.

L'avion est alors en chute libre et les personnels à bord "flottent" dans la cabine. La durée est en général courte, mais suffisante pour un entraînement d'astronaute ou une expérimentation.

L'intérêt de l'avion est la possibilité d'enchaîner plusieurs vols paraboliques dans une même sortie.

4°) Capsules récupérables :

Temps de microgravité de 15 à 30 jours et un niveau de microgravité de l'ordre de 10-3g à 10-4g, avec un emport possible de 140 à 500 kg ( TOPAS Italie + France, Space courrier RFA, Carina Canada, SRV aux USA, Photon en URSS et FSW1 en Chine)

5°) Fusées sondes :

Temps de microgravité 5 à 15 mn et un niveau de microgravité de l'ordre de 10-2g à 10-4g, avec un emport possible de 250 à 550 hg ( Texus france, Maser Suède, Conatec USA TR1 Japon)

6°) Satellites automatiques :

Temps de microgravité de quelques mois et un niveau de microgravité de l'ordre de 10-5g à 10-7g, avec un emport possible de 1000 à 5000 kg ( Eureca ESA, MTFF France, ISF USA, SFU Japon )

7°) Modules de Navette spatiale :

Temps de microgravité de 1 semaine et un niveau de microgravité de l'ordre de 10-3g à 10-5g, avec un emport possible de 4500 kg ( SPACELAB ESA, BOURANE URSS)

8°) Stations orbitales :

Temps de microgravité de plusieurs années et un niveau de microgravité de l'ordre de 10-g à 10-5g, avec un emport possible de 10000 kg ( Colombus ESA, FREEDOM USA JEM Japon, MIR1 et MIR2 URSS)

Guiziou Robert décembre 2000, sept 2011